HISTOIRE du JEU de TAROT

 

Il apparaît vers 1375 et s'implante tout d'abord en Italie sous le nom de NAÏBI avant de rayonner sous celui de TAROT dans toute l'Europe occidentale dès la fin du XIVème siècle. Il semble qu'il y fut introduit par des Arméniens fuyant leur pays devant l'avance turco-ottomane et la reddition des derniers bastions chrétiens au Levant.

Aux jeux de cartes antérieurs où 4 compagnies de 8 soldats numérotés de 2 à 9, avec à leur tête un Roi, une Reine, un Écuyer et un Valet, s'affrontaient sous 4 enseignes (Coupe, Épée, Bâton, Deniers en Italie) le Tarot rajoute une série de 22 cartes que les Italiens ont appelé TRIOMPHES et les Français ATOUTS ou ARCANES MAJEURS. Numérotées de 1 à 21, avec une 22ème non numérotée, ces cartes, plus fortes que toutes les autres, accordent la victoire face aux autres cartes.

Le jeu de Tarot est né. Il rencontre un succès foudroyant dans les couches populaires : de nombreux édits tentent, dès 1377, de réglementer le jeu, voire de l'interdire. Il séduit aussi les grands de ce monde : de nombreux jeux, dits Tarots Princiers, enluminés par les meilleurs artistes de l'époque, sont parvenus jusqu'à nous ( Tarot de Visconti, Milan, vers 1450; tarot dit de Charles VI, Italie du Nord, fin XVème siècle, etc. )

Nous possédons aussi quelques jeux populaires des XVIème et XVIIème siècles, imprimés par gravure sur bois et peints au pochoir.

A la fin du XVIIIème siècle, COURT de GEBELIN, s'inscrivant dans le courant de la franc-maçonnerie naissante, affirme que le Tarot exprime une connaissance cachée par les anciens, issue de l'Égypte pharaonique.

Le XIXème siècle s'engouffrera sur cette vision du Tarot qui l'éloigne de plus en plus du jeu de bistrot pour lui conférer un caractère divinatoire et ésotérique de plus en plus affirmé.

Le XXème siècle verra s'installer la cohabitation des deux utilisations : d'un côté le jeu de la Fédération, dépouillé de tout ésotérisme, avec ses images d'Épinal et ses quatre enseignes, Pique, Cœur, Carreau, Trèfle; de l'autre, les innombrables tarots divinatoires ou artistiques, qui ne sont pas faits pour jouer.

 

LE TAROT DE MARSEILLE

Les arcanes majeures du Tarot (les 22 atouts rajoutés) décrivent d'une manière codée le chemin de vie d'un individu, de son incarnation à sa libération. Dès l'origine deux traditions picturales cohabitent.

Celle des imagiers, avec le Tarot dit de Marseille, qui renseigne sur un style et non sur une origine géographique : d'ailleurs le plus ancien incunable qui nous soit parvenu ne provient pas de Marseille, mais de Paris, de l'atelier Jean NOBLET, au milieu du dix-septième siècle.

De cette tradition sont également issus le tarot de Jean DODAL, Lyon, vers 1701 et le fameux tarot de Nicolas CONVER, Marseille, 1760.

Celle des tailleurs de pierre, qu'on retrouve aussi sous l'appellation Tarot de Bologne, illustrée principalement par le Tarot de Jacques VIEVILLE (Paris, 1650), offre des différences notables sur les arcanes XV le Diable (de face ou de profil), XVI la Maison-Dieu (une tour avec une flamme jaillissante ou un troupeau de moutons et leur berger au pied d'un arbre), XVII l'Étoile (une parturiente ou un architecte) et XVIII la Lune (un bassin avec une écrevisse ou une fileuse à la quenouille).

On peut ajouter une troisième tradition, qui se fait jour dès le début du XVème : les tarots artistiques. Elle commence avec les tarots princiers dont nous avons déjà parlé et se poursuit jusqu'à nos jours : même Salvador Dali a peint son tarot! Dans ces œuvres parfois fort belles, inutile de chercher un quelconque sens intérieur, tant la démarche esthétique prime sur la véritable science traditionnelle.

 

LE TAROT DE NICOLAS CONVER

Archétype du Tarot de Marseille, le jeu fabriqué par Nicolas Conver dans son atelier de Marseille au milieu du XVIIIème siècle a servi de modèle à Paul MARTEAU pour proposer un tarot symbolique en 1930.

En s'inscrivant dans l'ésotérisme propre à son époque, Paul Marteau, qui se présente comme un simple restaurateur, fait pourtant œuvre originale. La comparaison avec son modèle de 1760 l'atteste sans équivoque.

Édité en plusieurs langues, ce tarot a connu un succès mondial qu'il doit tant à l'habileté du "restaurateur" qu'au gros travail de diffusion réalisé par les éditions Grimaud. Il constitue encore de nos jours la référence en matière de Tarot de Marseille et reste le plus utilisé à des fins divinatoires.

Les époques changent. En cette fin du vingtième siècle, deux tarots dans la tradition de CONVER viennent d'être réalisés, dont le mien en 1998.

Les principes qui ont guidé cette réalisation sont ceux de la tradition : fidélité à l'original de Nicolas Conver, en gommant ce qui est propre à Marteau et à son époque, en revenant au trait moins solennel de 1760 et en restituant la richesse de couleur de l'original, que Marteau, dans un esprit de rigueur, avait réduit.

Il ne vous reste plus qu'à comparer !